En 1989, les cinq pays du Maghreb (Algérie, Libye, Maroc, Mauritanie et Tunisie) ont créé l’Union du Maghreb arabe pour promouvoir la coopération et l’intégration économique. Trente ans plus tard, les possibilités de commerce régional entre ces pays restent largement sous-exploitées.
Cette question est plus d’actualité que jamais, car les pays du Maghreb doivent créer des emplois pour leur population jeune et en augmentation.
Accélérer l’intégration régionale permettrait de stimuler la croissance, de créer des emplois et d’ouvrir de nouveaux horizons pour près de 100 millions de personnes.
Plus d’échanges sont possibles
A l’heure actuelle, le commerce entre les pays du Maghreb ne porte que sur quelques biens. Il s’agit notamment des combustibles et des hydrocarbures que l’Algérie exporte vers la Tunisie et le Maroc, des huiles végétales, des machines, du fer et de l’acier que la Tunisie exporte vers l’Algérie et la Libye, et du fer, de l’acier, des articles d’habillement, des véhicules et des appareils électriques que le Maroc exporte vers l’Algérie, la Tunisie et la Mauritanie.
Selon nos calculs, présentés dans une étude récemment publiée, il existe de nombreuses possibilités d’accroître les échanges. Des flux d’exportation supplémentaires pourraient porter, par exemple, sur les services de transport, les produits alimentaires, les métaux et les produits chimiques marocains à destination de la Tunisie. Les produits minéraux du Maroc pourraient également être exportés vers l’Algérie et différents types de combustibles pourraient faire le chemin inverse. La Tunisie pourrait aussi exporter des légumes vers le Maroc et des produits minéraux vers l’Algérie.
Lors d’un débat qui s’est déroulé dans le cadre des réunions de printemps du FMI et de la Banque mondiale la semaine dernière, les participants ont examiné les avantages qui pourraient être tirés d’une intégration économique plus poussée au Maghreb (a). Une plus grande ouverture au commerce intrarégional de biens et de services permettrait de créer un vaste marché qui rendrait la région plus attrayante pour les investisseurs. Elle contribuerait à la constitution de chaînes d’approvisionnement régionales et à leur insertion dans les chaînes de valeur mondiales, et rendrait le Maghreb plus résilient face à des chocs économiques. En bref, l’intégration serait une source de croissance et d’emplois bienvenue. Ainsi, selon l’étude du FMI, la croissance dans les pays du Maghreb pourrait s’accélérer de 1 point de pourcentage à long terme.
À partir des enseignements tirés en Europe et en Asie, les participants au débat ont estimé qu’il était possible de parvenir progressivement à une intégration, en établissant des liens entre les secteurs et les pays à mesure que les circonstances s’y prêtent. Les périodes de crise économique ou de transition politique peuvent être propices à une intégration plus rapide. Les participants ont également relevé le rôle de puissants accélérateurs de l’intégration économique que pouvaient jouer les nouvelles technologies, qui, elles, ne connaissent pas de frontière.
(a) en anglais
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Ramzy Al-Amine est analyste à la direction du département de la stratégie, des politiques et de l’évaluation. Il travaillait auparavant au département Moyen-Orient et Asie centrale, où il a participé au lancement de l’étude sur l’intégration du Maghreb. M. Al-Amine est diplômé de l’université américaine de Beyrouth et titulaire d’une maîtrise de l’université de Georgetown. Ses travaux portent principalement sur la visualisation des données et le commerce international, et il s’intéresse également à des sujets liés à l’économie comportementale et à l’économie du sport.
Jean-François Dauphin dirige la division Maghreb du département Moyen-Orient et Asie centrale du FMI. Il est aujourd’hui chef de mission pour l’Algérie, après avoir été chef de mission pour le Maroc. Au FMI, il a travaillé sur plusieurs pays d’Afrique, d’Amérique centrale et d’Europe de l’Est, et a contribué à l’élaboration des politiques du FMI lorsqu’il faisait partie du département de la stratégie, des politiques et de l’évaluation. Avant de rejoindre le FMI, il a travaillé dans le secteur financier privé et une banque centrale, et a enseigné l’économie et les statistiques en France et au Rwanda.
Alexei Kireyev est économiste principal au FMI et ancien représentant du FMI auprès de l'OMC. Il dirige des missions du FMI dans les pays membres, fournit aux pays des conseils sur la politique macroéconomique dans le cadre de programmes appuyés par le FMI, et examine les conseils, les financements et les activités d’assistance technique du FMI. Avant de rejoindre le FMI, il a été conseiller économique du Président et économiste à la Banque mondiale, et professeur d'économie internationale dans diverses universités de Russie et des États-Unis. Il est titulaire d'une maîtrise de sciences économiques de l'université George Washington et d'un doctorat de sciences économiques de l'institut de relations internationales de l'université d'État de Moscou. M. Kireyev a publié de nombreux articles sur l'économie internationale et le commerce extérieur, la macroéconomie appliquée, les principes économiques et les problèmes économiques des pays à faible revenu.